Nicolas Cluzel
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Nicolas Cluzel se profile comme un artiste traversé par une multitude d'influences, naviguant de Garouste
à Paul Rebeyrolle, en passant par Georges Grosz, Bacon, voire même Manet dans ses aplats.
Sa peinture, gorgée d'une rage gestuelle, marie avec adresse un soupçon de cynisme, une décadence palpable
et des éclats de frayeur. Il entreprend une introspection audacieuse de notre époque, s'inspirant
des empreintes laissées par les grands maîtres et jetant un regard critique sur notre mode de vie
et ses dérives.
Au sein de ses toiles, s'étalent avec une puissance captivante des natures mortes, des vanités, des nus,
des déjeuners sur l'herbe tourmentés, des radeaux de la Méduse déchaînés, et d'autres réinterprétations
baudelairiennes qui imprègnent notre histoire de l'art. Dans le tableau exposé, la poussette devient le
théâtre d'une mise à nu audacieuse, une composition surprenante, un transport de chair et d'écorché mi-oiseaux
mi-homme à l'essence résolument baconienne. Un mystérieux Playmobil observe ce tumulte avec une fascination
hypnotique, plongeant dans un ballet terrifiant et dantesque où les membres se tordent en crochets,
une chorégraphie décadente et troublante qui capte l'attention de manière impérieuse.
Nicolas dévoile une puissance dramatique qui émane avec une intensité palpable. En libérant ses impulsions,
sa toile rugit, bravement déstructurée. La réapparition de cette figuration libre, rebelle et radicale
transparaît à travers son œuvre, secouant nos convictions. Dans un monde où la violence s'intensifie malheureusement,
c'est un cri audacieux, une déclaration viscérale qui s'affirme comme une position et une prise de conscience.
Un électrochoc artistique qui se manifeste au milieu des tourments de notre société, peut-être prémonitoire
d'un avenir difficile.
Frédéric Jean (2023)
LA PEINTURE EST ENCORE VIVANTE
et QUELLE PEINTURE !
ni convenue, ni contenue !
ni décorative, ni narrative !
ni lisse, ni optimiste !
ni anecdotique, ni propagandiste!
Mais alors, vous dites-vous, si elle n’est pas tout cela, QUELLE EST-ELLE CETTE FAMEUSE PEINTURE ?
Le titre de l’exposition donne quelques indices « PEINDRE A COUPS DE MARTEAU ». Nicolas cluzel peindrait donc
comme Nietzche philosophait ? Ça n’est pas faux ! dans la mesure où tous deux travaillent à déconstruire certaines
valeurs de leur époque. Mais laissons le penseur et son nihilisme et revenons à L’EXPERIENCE ESTHETIQUE - car c’est
bien de cela qu’il s’agit - de Nicolas Cluzel. Sa peinture CHAHUTE. Elle chahute nos perceptions de la réalité,
elle chahute les habituels critères du beau, elle bouscule, déborde, éclabousse, éclate, au risque de heurter
le regardeur et de remettre en question sa relation à l’image.
Des coups de marteau, vous n’en recevrez pas mais ne vous attendez pas à ressortir indemne !
L’œuvre de Nicolas Cluzel est FORTE, PUISSANTE, mais ne vous méprenez pas : elle est plus VIVANTE que VIOLENTE.
La touche est généreuse, majestueuse, fougueuse. Elle sert un sujet, car l’artiste a quelque chose à dire sur
notre monde « décousu » et il l’exprime avec EMPORTEMENT avec DEBORDEMENT. Il l’exprime, AVEC TALENT, à grands coups
non pas de marteau mais de mises en abîme, emprunts ou détournements de toiles célèbres de notre Histoire de l’Art.
Et si vous êtes attentifs vous verrez que sous l’apparent chaos tout est CONSTRUIT, la composition comme la palette
est parfaitement « pensée » telle celle des plus grands maîtres.
Si nous en avions l’autorité, cher Nicolas Cluzel, nous vous ferions entrer au panthéon des nouveaux expressionnistes…
Hélène de Montgolfier
(dans le cadre de l'exposition Peindre à coups de marteau au Musée de Tournon, 2022)
Il y a de l'acreté, du grimaçant, du convulsif, du blasphème, du sacrilège, du grotesque, de la férocité et du
tragique dans la figuration de Nicolas Cluzel... Autant d'ingrédients pour une nouvelle écriture plastique, pour
une formidable liberté et une joyeuse inventivité dans la démise en forme... Il faut être un grand peintre pour
zigouiller la figuration avec une telle maîrise et une telle nécessité interne à la peinture.
La gazette de Nicole (n°29 - 2020)
Nicolas Cluzel bouscule la matière, incarne à l'aide de gestes amples et de tons incendiaires des animaux écorchés
ou des bouquets fleuris. Héritier de Rembrandt et de Soutine, la lumière et l'onirisme actuels en prime, le besoin
de caricaturer cher à ses oeuvres anciennes désormais en sommeil, il fouaille les formes et maçonne les ambiances
avec avalanchitude (sic!).
Artension (n°155 - 2019)
Nicolas Cluzel sait pertinemment que les sujets en peinture sont limités et que l’objet de cette dernière est de
s’inscrire dans son temps au moyen de ces sujets. Le renouvellement de sens qu’il propose dans ses œuvres l’emporte
alors largement sur ce qui pourrait être sommairement perçu comme un art de citations. Si beaucoup peignent
ou sculptent l’action du temps sur la transformation des corps quelle qu’en soit la nature, Nicolas Cluzel, lui,
mesure les modifications que ce même temps introduit, au niveau des concepts, des idéologies, des croyances,
des modes de vie, dans la lecture des mêmes faits à quelques siècles de distance. Sa peinture est l’interprétation
d’une réalité et non sa simple reproduction. Il instrumentalise cette interprétation par une remarquable
connaissance des techniques et des caractéristiques physiques de la peinture. Le mimétisme imparfait, le choix
arbitraire des couleurs, la prise en compte de la fluidité de la peinture et des effets qu’on peut en tirer sont
utilisés pour donner à la réalisation finale sa propre personnalité. Et en faire un objet digne d’intérêt par
lui-même ou en d’autres termes une œuvre.
Yves Gnaegy
Galerie Anna-Tschopp (2019)
Une peinture décomplexée qui se joue des codes de la peinture classique et offre une figuration où l'humour tient
une place prépondérante.
Miroir de l'art (n°89 - 2018)
Il revisite les grandes peintures, il triture l'histoire de l'art, se vautre dans ses grands ancêtres peintres, reprend les sujets
et les transposent dans notre temps avec une fulgurance incroyable. Il ne copie pas, il interprète une oeuvre, comme un musicien
jouant du Bach avec en tête, au hasard, Gojira ou Stupeflip. […] Il tord le sujet pour le faire rentrer dans notre présent. […]
Julien Mahoudeau (2017)
[...] Il me semble que le travail pictural de Cluzel me confirme dans une de mes intuitions : la déformation (caricature, torsion,
grimace, convulsion) est un accès direct, pertinent à la représentation de l'humanité. L'ironie, dans son implacable cruauté froide,
me semble une production saine de la pensée, une sorte d'hygiène douloureuse, une action prophylactique. Il y a nécessité impérieuse
de malmener - pour son salut ! - le cirque de l'humanité, art compris. Il y a nécessité de la (nous) confronter à son (notre) grotesque. [...]
Denys-Louis Colaux
(Extrait du texte paru dans Chercheur d'art - Editions Jacques Flament - 2016)
[...] En première lecture, les toiles grotesques, granguignolesques et déjantées de Nicolas Cluzel semblent relever de la tradition
de la farce, de la fête populaire et débridée, dans une filiation directe avec les œuvres de la tradition flamande de Bosch, Bruegel
ou Ensor. Elles traduiraient la vision que Rimbaud donne de la vie : « La vie est la farce à mener par tous. » Bien que privilégiant
la vitesse d’exécution, Nicolas Cluzel a longuement observé les maîtres du passé pour en tirer des leçons et y puiser des caractéristiques
qui irriguent ses œuvres. On y trouvera, notamment, des traces de l’expressionnisme matiériste de Rebeyrolle, des éclaboussures gestuelles
à la Pollock, la dissociation du trait et de la couleur à la façon de Dufy ou Léger, la technique de badigeonnage de certains street-
artists, le grouillement narratif d’un Erró, la truculence jubilatoire des Flamands de la Renaissance, le souci de l’actualité de certains
dessinateurs de presse, les rencontres ou confrontations improbables chères aux surréalistes, la prégnance libératoire de la couleur des
Nabis, les mises en page inspirées des écoles orientales… Sa longue pratique de la bande dessinée, de 1996 à 2006, est aussi perceptible
dans la dislocation de ses personnages et dans l’exagération des physionomies expressives. De toute évidence, Reiser et Wolinski ne l’ont
pas laissé indifférent... Ni indemne…
Ce mélange détonant et détonnant, cette expression d’un flagrant délire, d’une gourmandise goulue et jouissive pour l’acte de peindre,
constituent d’évidents hommages, de claires déclarations d’amour à la peinture et à son histoire. S’ils prennent parfois la forme de la
dérision, ce n’est que pour exorciser les tragiques convulsions et les douloureuses grimaces de l’acte créateur. [...]
[...] À bien y regarder, les rieurs, les farceurs, les délires mis en scène par Nicolas Cluzel ne seraient-ils pas une façade pour masquer
un doute existentiel, celui dont Cioran écrit : « Le délire est sans conteste plus beau que le doute, mais le doute est plus solide. » ?
Ne s’agirait-il pas de la mise en évidence de la précarité de personnages désabusés qui se rient de la vie pour exorciser la déchéance, le
délabrement et la mort inévitables, dans une sorte de dernière danse macabre anthume ? Un dernier récital délirant en lieu et place d’une
veillée funèbre ? L’insolence, le sarcasme et le cynisme de surface ne seraient-ils pas des exutoires à un cruel sentiment d’abandon, de
terrifiante solitude ? Cioran, toujours lui, le relève : « Le cynisme de l’extrême solitude est un calvaire qu’atténue l’insolence. »
Louis Doucet
(Extrait du texte paru dans Subjectiles VII - Editions Cynorrhodon Faldac - 2016)
[...] L’univers y est sinistre, scénique, cynique ! La plupart des protagonistes sont des rieurs, des farceurs passagers assumant
leur disparité, le sourire en coin. Les autres habitants de la toile, eux, se contentent de jouir de l’animation ambiante.
Des masses de personnages qui s’amusent et se moquent, tous abusés qu’ils se savent par le théâtre de la vie et la mort.
Malgré cet ordinaire esprit cocasse, chaque corps connait le délabrement et la maltraitance. Une participation collective
à un récital d’horreurs et de joies. [...]
Il reste peu de place à la flagornerie dans ce monde où règne sarcasme et insolence !
Lara Tournemire
(Extrait du texte de l'exposition à la Galerie Fert - 2015)
[...] Nicolas Cluzel - comme d'autres artistes de sa génération - ont la peinture dans le ventre et la vitesse d'exécution au bout
des doigts. Ils sont bavards et amoureux de peinture. Ils prennent les choses en dérision, les situations en flagrants délits.
Ils lisent, regardent les images, toutes les images. Celles des peintres anciens, celles qui défilent dans nos rues, dans les
journaux, sur nos écrans. Ils rient et se moquent même. [...]
Cluzel badigeonne, là où il faut, quand il le faut. Le dessin se juxtapose à la peinture comme si la peinture jouait à la
corde avec le trait que l'artiste maîtrise bien. La peinture, comme pur acte de peindre, et la tripaille, qui est le sujet,
sont brossées goulûment. [...]
Ileana Cornea
(Artension n°128, portrait quatre pages - 2014)
Nicolas Cluzel ose des teintes étonnantes. Il dissocie le trait
et la couleur. Il casse les formes. Ses personnages et leurs aventures sortent tout droit de la bande dessinée des années
70 mais évoluent dans un univers affirmé de peinture. Il doit autant à Reiser qu'à Rebeyrolle. D'un inextricable fouillis initial
se dégagent progressivement des formes, des détails, des anecdotes qui animent le récit, le prennent à contre-pied, le font
rebondir. Nicolas Cluzel est un peintre de l'improbable. L'improbable des rencontres, l'improbable des circonstances,
l'improbable des confrontations de techniques utilisées. Avec pour le regardeur la sensation étrange que ces improbables
finissent par ressembler de fort près à la réalité que lui procurent quotidiennement les images de l'actualité.
Yves Gnaegy
(Texte de l'exposition "Focus" à la Galerie Anna-Tschopp - 2013)
Presse citron...
Voir dans l'étrangeté d'un bouquet, le cru animal !
Voir dans sa monstrueuse fourrure, les os et les dents !
Voir dans leurs entre-chocs, les déflagrations cosmiques !
Et voir dans le burlesque du sang des couleurs,
la pupille effarée de Narcisse au bord de l'effroi !
Yannick Lefeuvre
(Vivre l'Art Magazine - 2013)
[...] Les entités déchiquetées de Nicolas Cluzel s’ouvrent à tous les extrêmes des surgissements vitaux. De la crue crudité aux
affres du tragique,de la jouissance féroce au grotesque ricanant, infinies sont les passerelles au pays du tout-corps. [...]
En ce pays d’art grimaçant et convulsif, partout s’étend la rude hilarité des beaux sacrilèges, et l’âcreté des blasphèmes
qui savent désobéir quand il ne faut pas, tordant à vif le cou affligeant des tristounettes bienséances. Et ça rugit dans les hautes
gueules, et ça ravage les gosiers immenses qui saignent comme des supplices, ouverts comme des cavernes. [...]
Christian Noorbergen (2012)